1ère partie - Les origines du Christianisme


-100.000 av. J.-C. Nul de saura jamais ce qui s’est réellement passé ce jour-là, près de l’actuelle Nazareth, en Israël. Amenés par les leurs, deux défunts ont été inhumés dans une fosse. Autour d’eux, peut-être sur leurs corps, quantité d’ocre rouge, témoin d’un rituel funéraire. C’est dans ces tombes, vieilles de cent millénaires, que l’on observe les premiers moments de religiosité de l’homme.

Vers -10.000 av. J.-C. Devenu éleveur, l’homme est « sorti » de la nature : la religion s’anthropomorphise. Or, les premiers dieux sont des déesses. Comment en serait-il autrement ? La fécondité conserve pour lui un caractère magique et fascinant.

Vers -4.000 av. J.-C. Naissance de l’agriculture et de l’élevage, sédentarisation et urbanisation des populations : la « révolution néolithique » initie une nouvelle donne. L’homme est désormais exalté en tant que reproducteur, guerrier et chef suprême de la cité : c’est la revanche des dieux mâles.

Nous sommes à la période axiale, au milieu du Ier millénaire avant notre ère. La Perse et la Mésopotamie, jusqu’aux rivages orientaux de la Méditerranée, vont commencer à rompre avec leurs anciennes traditions qui ne suffisaient plus à répondre aux aspirations de l’« homme moderne » de ce temps. Cette révolution les conduira vers l’élaboration de la croyance en un Dieu unique, le monothéisme. La Grèce, patrie des dieux de l’Olympe, s’engage elle aussi dans son tournant axial. Mais de manière étonnante. La Grèce prendra en effet ce tournant par le biais, non pas de dieux et d’une religion constituée, mais de la sagesse et de la philosophie.

Nous allons maintenant nous intéresser au sujet de notre étude : LA NAISSANCE DU CHRISTIANISME.

Les premiers témoignages écrits au sujet de Jésus (Evangiles synoptiques et lettres de Paul) entendent montrer qu’il est à la fois un homme et plus qu’un homme. Qu’il a un lieu particulier à Dieu. Jésus lui-même – selon les propos qui lui sont attribués – reste très évasif sur son identité. Il se déclare « envoyé » d’un Dieu qu’il appelle son « Père » et auprès duquel il revendique une intimité particulière. Pour autant, il ne se fait jamais l’égal de Dieu. Il faudra attendre le début du IIe siècle et la rédaction de l’Evangile de Jean pour que Jésus soit présenté comme l’incarnation de Dieu.

Une telle affirmation, qui heurte aussi violemment la foi juive que la raison humaine, va susciter maints débats au sein du christianisme naissant.
  • Comment Dieu peut-il s’incarner sans perdre son statut totalement transcendant ?
  • Dieu peut-il souffrir et mourir ?
  • Comment concilier humanité et divinité en la personne de Jésus ?
  • Si Jésus est Dieu ? pourquoi parle-t-il de son Père qui l’a envoyé ?
  • Existe-t-il plusieurs personnes divines ?
  • Si oui, comment peut-on encore parler de l’unicité de Dieu, fondement du monothéisme ?
A l’aube du IIe siècle, on tourne encore autour du pot pour évoquer la divinité de Jésus. Un gouffre sépare en effet le titre de « Fils de Dieu » de celui de Dieu à proprement parler…
  • Comment le Galiléen a-t-il été engendré par le Père ?
  • Est-il inférieur à Dieu le Père ?
  • Comment se distribuent en lui la part d’humanité et la part de divinité ?
  • Est-il d’abord homme ou d’abord Dieu ?
L’Evangile de Jean va nourrir les débats et controverses des IIème et IIIème siècles. La notion de Verbe qui s’est fait chair – appelée incarnation – va dès lors réorienter toute la réflexion des chrétiens sur l’identité de Jésus. Les textes johanniques contiennent en germe la notion de Trinité. Ils évoquent non seulement le Père et le Fils, mais aussi l’Esprit. Dans le quatrième Evangile, l’Esprit saint est ainsi investi d’une mission qui lui était jusqu’alors inconnue : le successeur de Jésus après son départ (Jean 15, 26-27).

Pour aussi séduisante qu’elle puisse paraître à certains penseurs chrétiens, l’idée d’incarnation, et plus généralement le caractère divin de Jésus ne vont pas sans poser de sérieux problèmes ni soulever une avalanche de questions :
  • Comment Dieu peut-il épouser la nature humaine ?
  • Dieu a-t-il souffert et est-il mort en Jésus-Christ ?
  • Si Jésus est Dieu fait homme, quel est son rapport avec le Père ? Et avec l’Esprit saint ?
A l’aube du IIIe siècle, le christianisme a véritablement changé de visage. De secte marginale du judaïsme. Depuis la fin du règne de Septime Sévère (en 211), les persécutions se sont calmées, laissant place à une manière d’entente cordiale avec les Païens. Mieux : certains empereurs, tel Philippe l’Arabe (244-249), manifestent de la bienveillance à l’égard des croyants en Jésus… Mais c’était sans compter le brutal revirement inauguré par son successeur, Dèce, en 250. Si Dioclétien, empereur depuis 284, manifeste dans un premier temps de l’indifférence à l’égard des croyants en Jésus, c’est lui qui va engager contre eux la persécution la plus violente qu’ils aient eu à subir jusqu’alors (303-311). Ce n’est qu’en avril 311 que l’empereur Galère, sur son lit de mort, décide de mettre fin à cette violence intestine en promulguant un édit accordant à nouveau le droit aux chrétiens de tenir des réunions cultuelles. Mieux : cet édit reconnaît la légitimité de leur foi.

L’histoire mouvementée de ces cinq premiers siècles du christianisme voit ainsi l’émergence d’une Eglise forte sous la houlette du pape et de l’empereur. Constantin aura finalement réussi son audacieux pari d’unifier l’empire sous la bannière chrétienne. Dès 451 et le quatrième concile œcuménique de Chalcédoine, la grande majorité des chrétiens est parvenue à s’accorder sur un credo commun concernant l’identité de Jésus : une seule personne avec deux natures, il est à la fois Dieu et homme. Certes, le christianisme n’est pas pleinement uni, puisque chaque concile a suscité des mouvements schismatiques dont certains subsistent encore de nos jours. Mais l’empire s’est trouvé une foi commune, celle de la Grande Eglise, et cette dernière est parvenue à imposer son orthodoxie grâce au soutien des empereurs.

Paroles d’Evangiles
HISTOIRE DES ORIGINES DU CHRISTIANISME
De la religion originelle au concile de Chalcédoine
« Fiat lux et lux fit » (Genèse 1,3)

Introduction - Aux origines du Christianisme .
1ère partie - Les origines du Christianisme .
2ème partie - Les sources chrétiennes du Christianisme .
3ème partie - Les sources bibliques du Christianisme .
4ème partie - Jésus face à l'Archéologie et à l'Histoire .
5ème partie - Jésus, une vie d'homme .
6ème partie - Bouddha, Jésus .
7ème partie - Et Dieu dans tout ça ?... .



AUX ORIGINES RELIGIEUSES DE L’HUMANITE
Chapitre 1 – La religion originelle
Chapitre 2 – Quand Dieu était une femme
Chapitre 3 – Les dieux de la cité
Chapitre 4 – Les dieux du monde
Chapitre 5 – La période axiale de l’humanité

LES GRANDES VOIES PRE-CHRETIENNES DU SALUT
Chapitre Unique – Naissance du monothéisme

NAISSANCE DU CHRISTIANISME
Prologue – « Pour vous, qui suis-je ? » – Marc 8,29
Chapitre 1 – Jésus vu par ses contemporains – 1er siècle
Chapitre 2 – Jésus au pluriel – IIème & IIIème siècles
Chapitre 3 – L’homme-Dieu – IVème & Vème siècles
Epilogue - « Je crois… »